Le monitorage hémodynamique est essentiel en médecine pédiatrique périopératoire et en soins intensifs, car il permet d’assurer une perfusion tissulaire et un apport en oxygène adéquats chez les patients les plus vulnérables. Bien que les paramètres de base en anesthésie pédiatrique, tels que la fréquence cardiaque, la pression artérielle et l’oxymétrie de pouls, jouent un rôle essentiel dans le monitorage périopératoire de routine, leur capacité à refléter avec précision le débit cardiaque (DC) et la perfusion globale est limitée.
Les enfants, en particulier les nouveau-nés et les nourrissons, diffèrent considérablement des adultes sur le plan de la physiologie cardiovasculaire.
- Leur réserve cardiaque est limitée en raison :
- d’un myocarde immature
- d’une compliance réduite
- d’une plus grande dépendance à la fréquence cardiaque pour maintenir le débit cardiaque.
- Les signes vitaux traditionnels sont souvent de mauvais indicateurs de l’état de perfusion :
- une pression artérielle normale ne garantit pas un débit cardiaque ou une oxygénation tissulaire adéquats
- la tachycardie peut refléter une douleur, une fièvre ou un stress plutôt qu’une hypovolémie, pour ne citer que quelques exemples.
Par conséquent, le monitorage hémodynamique avancé et l’évaluation du DC sont des outils précieux pour guider des interventions rapides et précises pendant la période périopératoire ainsi que plus tard en unité de soins intensifs pédiatriques.
Les raisons majeures pour lesquelles un monitorage cardiovasculaire prolongé, y compris la mesure du DC, est recommandée sont les suivantes :
- Évaluation directe de la perfusion systémique
- Détection précoce de l’instabilité circulatoire avant l’apparition de signes cliniques manifestes
- Recommandations quantitatives pour la thérapie liquidienne et/ou les médicaments vasoactifs
- Évaluation de l’apport en oxygène par rapport aux besoins métaboliques
En fin de compte, l’objectif n’est pas simplement d’optimiser les chiffres, mais plutôt d’individualiser la prise en charge hémodynamique, de prévenir les dysfonctionnements organiques et d’améliorer les résultats.
Bien sûr, tous les enfants n’ont pas besoin d’une monitorage cardiovasculaire prolongé. Le monitorage prolongé du DC est indiqué chez les patients pédiatriques présentant un risque de compromis hémodynamique, en particulier lorsque l’évaluation clinique est insuffisante ou que les décisions thérapeutiques nécessitent des données précises. Ce sont les patients présentant des comorbidités importantes et/ou les patients subissant une intervention chirurgicale majeure qui peut entraîner une perte de sang ou une instabilité hémodynamique importante.
Il ne fait aucun doute que le groupe de patients suivant tire grandement profit d’une monitorage hémodynamique avancé : les enfants souffrant d’une cardiopathie congénitale ou acquise, d’un choc septique ou distributif, d’une déshydratation sévère avec pertes hydriques continues ainsi queles patients atteints d’hypertension pulmonaire, défaillance organique ou de dysfonctionnement multiorganique, d’hypotension persistante ou d’acidose métabolique inexpliquée, ou bien subissant une intervention chirurgicale majeure.

En période périopératoire, le monitorage du débit cardiaque aide à optimiser la précharge et la postcharge et à détecter précocement toute détérioration hémodynamique.
Dans les unités de soins intensifs pédiatriques, il permet une prise en charge personnalisée des enfants gravement malades présentant des changements physiologiques dynamiques. Les nouveau-nés et les nourrissons en bénéficient tout particulièrement en raison de leur physiologie instable, de leurs faibles marges de sécurité et de leur grande vulnérabilité à la surcharge liquidienne, notamment dans des cas tels que l’entérocolite nécrosante ou la réparation d’une hernie diaphragmatique.
METHODES DE MESURE DU DEBIT CARDIAQUE
Il existe plusieurs méthodes pour mesurer le débit cardiaque.

En ce qui concerne plus particulièrement les nouveau-nés, les nourrissons et les enfants, la plupart des praticiens recherchent des méthodes moins invasives ou non invasives afin de ne pas causer de dommages supplémentaires avec l’utilisation de méthodes invasives ou de cathéters centraux supplémentaires chez ces patients vulnérables.
C’est pourquoi les méthodes d’analyse du contour de l’onde de pouls telles que la technique PRAM (Pressure Recording Analytical Method) sont particulièrement intéressantes pour cette cohorte de patients. PRAM est une technique de monitorage hémodynamique non calibrée, battement par battement, utilisée pour estimer le débit cardiaque (DC) et d’autres paramètres hémodynamiques avancés. Cette méthode utilise la relation entre les variations de pression et les changements de volume dans le système artériel, en intégrant la forme, l’amplitude et le contenu fréquentiel de l’onde. Elle appartient à la famille des technologies d’analyse du contour de l’onde de pouls, mais avec une différence essentielle. La PRAM ne nécessite pas d’étalonnage externe (par exemple, thermodilution), ce qui la rend extrêmement utile en pédiatrie où les méthodes d’étalonnage invasives sont souvent limitées. La PRAM ne nécessite qu’une ligne artérielle (c’est-à-dire radiale ou fémorale) qui est habituellement placée chez les enfants gravement malades ou avant une intervention chirurgicale majeure. Contrairement à d’autres systèmes de forme d’onde artérielle, la PRAM est totalement indépendante de tout étalonnage algorithmique avec des données préestimées sur le patient ou des constantes empiriques. Sa technologie basée sur la théorie des perturbations permet d’évaluer en temps réel ce qui se passe réellement chez ce patient spécifique à ce moment-là, en ne prenant en compte que les informations provenant de sa forme d’onde de pression artérielle.

Malgré la nécessité d’un accès artériel fiable et de formes d’ondes de haute qualité, cette option reste très intéressante en pédiatrie, où il est essentiel de réduire au minimum les techniques invasives.
RÉFÉRENCES
Alonso‐Iñigo J. M., Escribá F. J., Carrasco J. I., Fas M. J., Argente P., Galvis J. M., & Llopis J. E. (2016). Measuring cardiac output in children undergoing cardiac catheterization : comparison between the Fick method and PRAM (pressure recording analytical method). Pediatric Anesthesia, 26(11), 10971105. https://doi.org/10.1111/pan.12997




